Bilan

Puis un matin on se réveille un peu
Un peu moins bien peut être un peu plus vieux
Mais on sourit autant
Et on sourit des rides aux coins des yeux
Et on sourit du blanc sur nos cheveux
On a trois fois vingt ans
Ne faut-il pas avant l’oubli
Faire le bilan de ce gris
Comme ce matin de mes premiers dix ans
Où mon frangin m’a dit tu deviens grand
Mais pourquoi donc grandir ?
Puis j’ai grandi quand elle s’est mise à nue
Cette folie de mon enfance perdue
Dans un premier plaisir
 
Ne faut-il pas avant l’oubli
Faire le bilan de son lit
Ne faut-il pas avant que flanchent nos mémoires
Écrire le mieux de notre histoire

Et puis ce soir où j’ai posé mes mots
Sur ma guitare et qu’ils m’ont dit bravo
Je m’y voyais déjà
Mais pas de nom, tout en haut de l’affiche
Juste une chanson aux odeurs de « boule, miche »
Et de fins de repas

Ne faut-il pas avant l’oubli
Faire le bilan de l’envie
Ne faut-il pas avant que flanche sa mémoire
Écrire les mots d’une guitare

Et cet automne où par un’ nuit sans lune
Une petite môme est devenue la une
D’mon livre de papa
Puis d’autres joies, puis d’autres larmes aussi
Et d’autres bras et puis cet autre lit
D’une Marie couche-moi là
Ne faut-il pas avant l’oubli
Faire le bilan de ses vies

Ne faut-il pas avant la fin de son histoire
Écrire un peu de sa mémoire
…
On a trois fois vingt ans
Quand un matin on se réveille un peu
Un peu moins bien, peut-être, mais heureux
D’être encore là vivant
 
(3 mai 2022 )